Forum de RP 18+ - Contexte contemporain avancé - Avatar non réaliste - Thème principal maître/esclaves - 2 races (humain/hybride) - 300 mots min par post
Feat : Dino Cavallone Manga : Katekyo Hitman Reborn !
Pseudo • Âge : Tetsu • 32 Où avez-vous trouvé le forum ? Il y a longtemps, on m'en a montré le chemin. Votre avis sur le forum ? Top ! Lien de votre personnage avec un autre personnage du forum ? Aucun, mais j'envisage de créer au moins un prédef, pour le coéquipier de Tetsu. Quelque chose à ajouter ? Désolé si l'histoire est longue et peut paraître un peu décousue (la première partie, sur son enfance, est racontée du point de vue du professeur de Tetsu).
PHYSIQUE : Allure générale : 1m79 pour 70 kilos. Il n'est sans doute pas trop mal loti comparé à d'autres, surtout pour un japonais. Pourtant, Tetsu a toujours véhiculé une apparence plutôt tendre, selon certains. Son visage ovale et légèrement anguleux accentue cette impression, bien loin de cette image d'homme sûr de lui qu'il veut donner en général, compte tenu de sa position au sein de la police. Il en résulte alors un savant mélange entre charisme et douceur, fermeté et fragilité… et si son corps élancé semble parfois trop mince, il n'en est pas moins assez résistant. Mais il est vrai qu'en tant que flic ou dans sa vie privée, Tetsu utilise peu la force et n'aime pas faire preuve de violence. Il n'a pas le physique pour et agir dans la précipitation n'est pas trop dans ses habitudes. Tetsu préfère à cela adopter une attitude plus coulée, une démarche lente, mains en poches. Certes, il n'est pas bien épais et se dit parfois qu'il souhaiterait être plus grand ou plus massif, mais pense qu'on ne gagne rien à se rêver autrement qu'on ne l'est. Il reste donc un homme sportif et actif, mais qui travaille surtout son endurance et son agilité, notamment par la course à pieds et le tir. D'ailleurs, quand on lui dit qu'il pourrait développer un peu plus sa musculature, il rétorque qu'il n'a pas que ça à faire et qu'il en a déjà assez pour l'utilité qu'il en a.
Cheveux, visage : Des cheveux fins, d'un châtain plutôt clair tirant vers le blond vénitien. Sa mère avait les mêmes paraît-il, héritage génétique qu'elle tenait du côté européen de sa famille. Ces mèches volages lui descendent jusque sur la nuque et l'une d'elles, plus abondante, balaye parfois son visage. Tetsuhito les attache rarement et les coiffe souvent sans trop d'attention. Au dessous, on peut voir un « jolis minois » au menton et nez arrondis, illuminé par ses yeux effilés d'un brun-doré brillant. Ils trahissent aisément ses émotions, de l'expression la plus douce, affectueuse ou mélancolique… à la plus sérieuse, déterminée ou contrariée. Les yeux sont le reflet de l'âme dit-on. Ajoutez à cela une bouche fine et bien ourlée, aux lèvres claires, et vous aurez tracé son délicat portrait qui en ferait sans doute craquer plus d'un. Mais selon Tetsu, ce visage n'est qu'un masque illusoire qui vieillira en même temps que lui et perdra bien trop vite sa beauté… Il y a tellement plus à apprécier chez quelqu'un, que son physique !
Goûts vestimentaires : Malgré son statut social, il n'est pas spécialement porté sur les uniformes et tenues réglementaires. Il est vrai qu'il dispose d'une garde robe bien fournie avec divers costumes faisant plus sérieux pour son travail, mais il apprécie surtout de s'habiller comme bon lui chante en dehors des heures de service. Cela peut aller d'un simple jean et d'un t-shirt à manches courtes près du corps avec un sweat à capuche ; jusqu'aux kimonos, qu'il trouve très confortables et agréables à porter lorsqu'il reste chez lui ; en passant par des tenues mixtes : chemise à rayures, veste cintrée en velours noir et pantalon près du corps sur chaussures élégantes.
Particularités : • Tetsuhito porte parfois des lunettes pour lire, quand ses yeux sont fatigués. • Certaines blessures très récentes, datant de sa dernière « enquête », ne sont pas encore totalement remises, notamment une blessure par balle lui ayant perforé le bras, sous l’épaule droite, et dont il gardera certainement la cicatrice. • Ces dernières années, il s'est également fait réaliser plusieurs tatouages sur le corps. Tous, sauf un, sont des répliques exactes des tatouages que son ancien professeur possédait : - Un crâne enveloppé de flammes bleutées et noires à la base du cou, côté gauche, lui rappelant de garder une volonté forte. - Une flamme bleue sur le dessus de la main gauche, d'où s'échappent des fils barbelés noirs qui entourent son bras et sont surplombés par la silhouette d'un cheval cabré, elle aussi noire et enflammée de bleu, sur l'avant-bras gauche. Symboles d'une liberté retrouvée en s'échappant des entraves. - Sur le même poignet, coupant les fils noirs, le mot « Barracca » en lettre capitales. D'origine Corse, il signifie originellement « masure, toit ». En le lisant sur le poignet de son professeur, Tetsuhito l'avait interprété comme « une protection, un abri, un foyer ». Il ne l'a jamais oublié depuis. - Plus haut et toujours sur le bras gauche, au dessus du cheval, un soleil rouge-orangé tel un blason de famille. - Enfin sur son flanc gauche, du bassin jusqu'aux côtes, un dragon noir enflammé de bleu qui court sur sa peau et enveloppe sa taille jusque dans son dos au creux des reins. Ce tatouage est aussi un souvenir de son passé, mais le seul qu'il a lui-même créé…
CARACTÈRE : Pour ceux qui n'auraient pas le courage de tout lire, résumons en disant simplement que Tetsu peut s'avérer déroutant pour ceux qui cherchent à le connaître vraiment. Car ce qu'il montre en société ou au travail, sa façon d'être en privé ou dans sa vie intime, et ce qu'il est réellement au fond de lui… sont des éléments à la fois très différents et qui forment un tout complexe. On dit souvent de lui qu'il est quelqu'un de discret, trop sérieux et posé, du genre à toujours prendre le temps de la réflexion, à ne pas foncer tête baissée. Peut-être même un peu hautain, autoritaire et froid, selon certains de ses collègues prêts à le dénigrer. Pourtant, tout cela n'est qu'apparences et faux semblants, la volonté d'un homme droit et honnête qui voudrait maîtriser son environnement, toujours savoir ce qu'il fait et agir de sorte à ne commettre aucune erreur… Mais sa réelle nature est au contraire beaucoup plus spontanée, riche en émotions et un brin naïve ; maladroite, douce et attentionnée ; pleine de doutes et d'hésitations. Une nature qu'il tente de réprimer au quotidien, surtout au travail, pour paraître plus fort et assuré qu'il ne l'est en réalité. Alors très rares sont les personnes avec qui il peut être lui-même, en toute confiance, et qui connaissent tous les aspects de sa personnalité : peut-être certains d'entre vous ne le verront-ils que comme une personne timide ou effacée qui se lie peu aux autres et n'aura sans doute pas grand chose d'original à première vue. Tandis que d'autres le verront seulement tel un amant passionné et sans attache fixe, qui multiplie les aventures sans lendemain. Ou encore, des qui le prendront juste pour un homme sévère, fort de caractère et déterminé, qui ne se laisse pas marcher sur les pieds et ne pense qu'au travail… Sans pourtant qu'aucun de ces témoins n'ait une vision d'ensemble de qui est réellement Tetsuhito.
Pour ceux qui souhaiteraient en savoir plus, vous savez ce qu'il vous reste à faire…
Lorsqu'on le rencontre pour la première fois, ses traits de personnalité les plus remarquables sont certainement sa discrétion, son calme et son professionnalisme. Viennent souvent ensuite une sévérité proche de la froideur, avec cette distance qu'il instaure face aux autres, tel un écran de protection. Alors que si vous prenez la peine de l'observer davantage, vous remarquerez qu'il a pour tout le monde, un sourire aux lèvres feutré, même pour ceux qu'il n'apprécie pas vraiment. Tetsu vous semblera alors plus abordable, compréhensif et pas si farouche. Mais là encore, ce ne sera pas totalement déterminant pour le cerner. Et peut-être réaliserez-vous qu'en fin de compte, ce sourire est le plus souvent dénué de sens… Ce n'est qu'une image reflétée sur le miroir de leur regard, pour le bon plaisir de ses interlocuteurs. L'image d'un « gentil garçon » infiniment patient, ne disant pas un mot plus haut que l'autre et donnant même l'impression de ne pas être en mesure de s'énerver. Une image tellement fausse, qu'elle déroute et surprend toujours lorsqu'elle se brise, lorsqu'on découvre enfin que, loin d'être aussi effacé, Tetsu possède en fait un fort caractère aux émotions et opinions tranchées, à la fois fougueux et prudent, de temps en temps légèrement bougon et râleur sur les bords… Principalement dès que vous aurez le dos tourné : face aux personnes qu'il aime, il aura un peu de mal à tenir tête très longtemps, sauf si c'est important. Mais pour les autres, rien n'est garanti, bien qu'il n'aime pas s'emporter, ni se faire remarquer.
Ces hommes qui s'énervent pour un rien, ou se montrent délibérément mauvais, ont d'ailleurs toujours été une énigme incompréhensible pour Tetsuhito, bien qu'ils aient le don d'éveiller chez lui une certaine attraction, tout aussi inexplicable… Telle sa dernière relation « sérieuse », qui s'est achevée il y a un mois et impliquait un homme de cette trempe, un yakuza gérant mal ses colères et sa possessivité. Entraîné dans un labyrinthe d'émotions, aussi incontrôlables que contradictoires, et des situations dont la violence l'a profondément marqué, Tetsu en a gardé quelques séquelles traumatiques, qu'il tente d'ignorer mais qu'il n'a pas encore surmontées… Certains contacts physiques dans l'intimité, un peu trop soudains ou imposants, peuvent le crisper et déclencher un rejet vif mais momentané de sa part. Certaines situations au quotidien, de tension ou de violence, peuvent le tétaniser brusquement et le faire littéralement trembler de peur, à son corps défendant… Il lutte farouchement contre ces réactions parasites qui ne lui ressemblent pas et voudrait parvenir à surmonter ce problème sans avoir besoin d'en parler à un psy. Mais sa seule parade pour le moment est de s'arranger pour dominer les situations et rencontres qui s'offrent à lui : s'il garde le contrôle et ne se laisse pas submerger, il espère réussir à vaincre ces peurs.
Quoi qu'il en soit, il lui est difficile de ne pas être réceptif à ceux qui l'entourent et il ressent en permanence un mélange de curiosité et de désir de proximité. Sans doute les conséquences d'une solitude éprouvée durant la majeure partie de sa vie… Il déteste littéralement être seul et ne peut s'empêcher de toujours rechercher une compagnie, même si vous pourrez toujours courir pour qu'il le clame de vive voix. Au delà d'une légère timidité réservée, Tetsu n'est donc pas timoré en présence d'autres personnes et il concède même volontiers qu'il est le premier à aller les voir et le dernier à renoncer s'il se fait jeter ! Acceptez-le donc tel qu'il est et il vous le rendra au centuple. Mais rejetez-le… et il ne lâchera pas le morceau avant d'être sûr et certain qu'il ne reste plus aucun espoir, quitte à souffrir de son obstination. C'est au-delà de sa volonté, il ne sait pas agir autrement et serait capable de tout faire pour la ou les personnes tenant une place dans son cœur, jusqu'à se sacrifier afin de les protéger ou ne pas les blesser… Un mélange de naïveté bornée et de gentillesse trop idéaliste. Il déteste cet aspect de sa personnalité qui le rend plus vulnérable qu'il ne le voudrait, car il vit mal qu'on s'amuse à jouer de ses sentiments, à le manipuler sur ce besoin qu'il a d'être toujours entouré… Néanmoins, ne vous avisez pas de le tromper, car vous aurez un mal fou à vous faire pardonner cette trahison. Il est plutôt du genre rancunier et ne manquera pas de vous le faire comprendre si vous le heurtez ou trahissez sa confiance, car il ne la donne pas à n'importe qui.
Certains vous jureraient que c'est sans doute l'aspect le plus contradictoire chez lui : dans une attitude proche de la nonchalance, coucher avec ceux qui le désirent ne lui pose pas vraiment de problème, tant qu'il n'y aucune implication plus poussée et qu'il n'est question que d'une histoire d'un soir. Tetsu se fiche alors éperdument de ce que ses amants peuvent faire avec d'autres après lui, ça ne le regarde pas. Mais dès qu'il s'agit d'amour, il peine à le gérer au point d'être capable d'aller lui-même voir ailleurs, comme pour se convaincre que ces sentiments ne sont pas si importants que ça. Alors, ne vous amusez pas à lui faire croire en l'amour si ce n'est pas sincère. Ses pires défauts mis à jour, vous reviendriez certainement sur vos vœux et, aussi calme puisse-t-il sembler en apparences, Tetsu sait parfaitement que ce genre de sentiments le déstabilisent. Or il ne tient pas à revivre ses mésaventures passées : mieux vaudrait se tirer après un bon règlement de compte ! Enfin, si sa première réaction n'est pas d'aller s'enfermer pour pleurer pendant des heures. Mais il préfère garder ça pour lui.
Enfin, Tetsuhito est un peu tête-en-l'air parfois. Il est tout de même bien obligé de redescendre de son petit nuage chaque jour pour ne pas faillir à ses responsabilités, qu'il s'agisse de son boulot de flic où il essaie de se montrer le plus sérieux possible, ou encore de son patrimoine financier à gérer. Les choses matérielles de la vie sont toujours là pour lui mettre du plomb dans la tête. Amour. Tristesse. Argent… Mort. Le regard des autres qui semblent toujours à l'affût de sa moindre erreur. L'absence de regard de son père lorsqu'il vivait encore… Solitude et déni d'existence. Enfant, il n'a presque connu que ça. Ce qui l'a conduit à devenir un homme ayant peu confiance en lui, qui peut avoir besoin de soutien et d'encouragements pour avancer. Là encore, n'attendez pas qu'il en demande à tout bout de champ. Quémander ouvertement de l'affection ou de l'attention, parler de ce qu'il ressent, ce n'est pas toujours évident. Surtout qu'il tend souvent à nier l'évidence des choses par automatisme : son père faisait comme s'il n'avait pas de fils et Tetsuhito fait comme si son existence ne comptait pas, seules les apparences comptent. L'image qu'il donne de lui-même et ce que les autres croient voir en lui. Paraître plus dur qu'il ne l'est au fond, être « digne » de sa famille, sévère, stricte, indifférent… Il essaye de ressembler à cette image, de ressembler à son père, quelque part, mais n'est pas dupe. Il sait bien qu'il n'est pas un expert dans ce domaine et que ses leurres ne sont pas parfaits, ni permanents : son fond tendre et adorable ne peut que ressortir aux yeux de ceux qui savent observer.
Nationalité : Japonaise Niveau Social : Fortuné, mais vit simplement. Métier : Policier/Enquêteur Assistant du commissaire
Orientation Sexuelle : Homosexuel ambivalent (récemment, il essaie plus de rester dominant, pour surmonter ses faiblesses, mais n'y parvient pas toujours).
Tetsuhito à 9 ans
Tetsuhito à 20 ans
Il était une fois…
FAMILLE
- Tsunemi Tanaka (PNJ) : sa mère, morte en lui donnant naissance ; il n'a ni frère ni sœur. - Noburo Tanaka, plus connu en tant que "Général Tanaka" (PNJ) : son père, mort au combat il y a quelques années. - Sanzo Tanaka (PNJ) : son oncle, âgé de 36 ans et plus jeune frère de Noburo, vit avec son épouse dans le sud du Japon. Tetsu n'a aucun contact avec eux et ne les a croisés qu'à l'occasion de l'enterrement de son père. - Kenichi Wataru (Prédéfini) : Son coéquipier depuis 2 ans, ils se connaissent depuis 3 ans et Kenichi lui a été d'un grand soutien pendant une période difficile de sa vie. Il est également le seul véritable ami de Tetsu… et ne le laisse pas indifférent. Mais jusque-là, il l’a gardé sous silence afin de préserver leur amitié.
HISTOIRE
Le 31 Octobre, Halloween bat son plein dans les rues de New York. Un jeune japonais de 18 ans, seul dans son petit appartement de la cinquième avenue, se souvient des jours passés sans savoir que le bébé naissant à cette seconde quelques milliers de kilomètres plus loin, au Japon, causera sa perte.
~ Dîtes Sensei, quand je trouverai une personne précieuse à mes yeux, je traiterai cette personne avec le plus grand soin, à jamais. ~ Une des cases de son esprit est sans doute totalement hors-service ou un truc du genre. ~ Je ne lui ferais rien qui puisse le faire se sentir mal. Je la chérirais. ~
* * *
Un bébé, aux rares cheveux châtains et aux joues couvertes de larmes après son premier cri, vient de naître. Sa mère prononça son nom d'une voix épuisée, Tetsuhito, juste avant de rendre son dernier souffle et de fermer les yeux à jamais. Son père, un homme portant la tenue militaire des gradés de haut-rang, regarde ce nouveau-né avec un sentiment mêlé de colère et d'amour… cet enfant à tué celle qu'il aimait, mais il est également tout ce qui lui reste d'elle. Il laisse une infirmière ôter le bébé des bras de la défunte pour aller le laver et lui donner son premier lait avant qu'il ne soit confié à ses bons soins. Pendant ce temps, sous ses yeux, on recouvre le visage de sa femme d'un drap blanc… puis on lui demande de sortir. Tout sera mis en œuvre pour que son épouse ait droit à un enterrement digne des plus grands dignitaires.
~ J'aime Tetsu… Tetsuhito. ~
* * *
Trois ans ont passé. Le bébé a grandit, il est devenu un enfant radieux, dont les yeux brun-dorés et brillants, pétillent d'intelligence. Ses sourires illuminent le grand pavillon dans lequel il vit depuis sa naissance, avec les domestiques, une nourrice, un professeur, une kyrielle d'hommes de mains… et son père. Du moins quand ce dernier est présent, c'est-à-dire rarement. Cet homme renommé pour ses haut-faits militaires durant la guerre est également connu pour ses absences longues et régulières… tout le monde dans la maisonnée sait qu'il porte peu d'intérêt à la vie de famille depuis la mort de sa femme. Sinon pourquoi préférerait-il passer tout son temps libre à la base militaire, même lorsque rien ne le nécessite, plutôt que de passer du temps avec son fils unique, cet enfant si adorable et gentil que chacun reste sous son charme? Sans doute est-il plus préoccupé par sa carrière que par l'éducation de son seul enfant. Et pourtant ne lui a-t-il pas choisi ce qu'il se faisait de mieux en matière de compagnie et d'éducation? Une des meilleures nourrices de la ville, un jeune professeur japonais venu des USA et renommé pour ses qualités d'enseignants auprès des jeunes enfants, les employés de maison les mieux qualifiés et fidèles que l'on puisse trouver, et des gardes du corps si sérieux et efficaces que même un chef d'état pourrait le jalouser… Cet homme-là sait s'entourer des meilleurs, comme toujours. Son fils devrait s'en réjouir et se contenter de cette abondance : le Général ne veut pas s'embarrasser d'un enfant tant que celui-ci ne sera pas en âge de comprendre les choses de la vie et l'obéissance que l'on doit à un homme tel que lui, respecté par des milliers de soldats pour les victoires qu'il leur a apporté. C'est ainsi et ça ne sera pas autrement.
* * *
" Ne perds pas espoir ! Je t'assure, avoir confiance en toi c'est la meilleur chose à faire… montre à cette fille quel garçon tu es et je suis sûr qu'elle te regardera autrement, fais de ton mieux… d'accord, Tetsu ? "
Une mine réjouie et un sourire d'enfant de bientôt neuf ans. L'âge de ce petit garçon aux cheveux clairs qui a bien grandi et qui, comme seuls les enfants savent le faire avec innocence et sans arrière-pensée, s'est enamourée d'une jolie petite fille de son âge, sa voisine. Une mignonne petite brune aux cheveux ondulés qu'il voudrait inviter à son anniversaire devant se dérouler deux mois plus tard… mais jusqu'à présent, la gamine n'a eu aucun regard pour ce petit voisin riche qui vit dans une grande maison : ses parents à elle ne sont pas si fortunés et légèrement aigris, ils ne font que lui répéter qu'elle ne doit pas s'intéresser à ce qui se passe dans cette maison sinon ils auraient des ennuis… le Général est un homme très redouté. À l'opposé, Shin Hatsubo, le professeur du petit garçon, cherche à encourager son jeune protégé pour qu'il ne renonce pas à cette première attirance d'enfant… et pourtant dieu sait que ses pensées se troublent dès qu'il pose les yeux sur lui. Mais pour l'instant, il ne veut pas plus… il n'a pas le droit d'avoir plus.
~ C'est tout ce qu'il y a à prendre. Je ne demanderai pas davantage. Tout ce que je souhaite c'est de continuer à le voir sourire… ~
La petite fille a refusé l'invitation avec la pression de ses parents et Tetsu revient les yeux brillants de tristesse… il n'a personne d'autre à inviter, il ne connaît pas d'autres enfants de son âge comme il n'est jamais allé à l'école : il a toujours étudié à domicile et son seul véritable « ami » est Shin, son professeur particulier qu'il a toujours eu auprès de lui depuis ses trois ans. Le jeune homme, âgé de 27 ans, essaye à nouveau de réconforter l'enfant en lui promettant qu'il fera tout pour l'aider à convaincre la fille de venir… cette promesse ramène un sourire sur le visage de Tetsu qui acquiesce d'un signe de tête avant de s'élancer dans le jardin sous les yeux de son professeur qui ne peut détourner son regard de lui.
~ Si mignon, je voudrais voir ce visage pour toujours. Mais c'est bizarre… est-ce que je me fais des idées ou bien…? Son visage semble tellement triste parfois… ~
* * *
Les jours passent, mais malgré ses efforts, la petite fille et ses parents refusent toujours. Le père de Tetsu brille également par son absence, pour ne pas changer : il a rarement assisté à l'anniversaire de son fils depuis sa naissance. De son côté, les pensées de Shin sont de plus en plus obnubilées par ce petit garçon qu'il chérit tant. Même lorsque d'autres lui parlent, il ne parvient pas à rester concentré et ses yeux recherchent toujours la petite tête blonde qui essaye encore d'inviter sa voisine… en vain.
~ Ah… encore raté… je n'arrive plus à voir son visage heureux. ~
" Tetsuhito… je pense que c'est bien de continuer à insister, mais ce serait mieux si tu essayais de lui montrer tes bons côtés, j'espère qu'elle finira par accepter vu que tu fais de ton mieux pour la convaincre, pas vrai ? " " … Et vous, Sensei? Qu'est-ce que vous… pensez de moi ? " " … J'aime… vraiment quand tu fais de ton mieux Tetsu, continue comme ça. Tu veux que je l'appelle? Attend-moi alors je vais la… " Une petite main qui s'agrippe à la manche de l'homme pour l'empêcher de partir loin de lui. " Non, Sensei !… Je… je voudrais que Sensei en sache plus… je voudrais voir Sensei heureux. "
~ Moi ? Je n'ai rien à voir avec ça… pourquoi ? ~
* * *
Deux jours plus tard, seul dans sa chambre allouée du grand pavillon, Shin semble déphasé, son esprit totalement préoccupé par ce qu'il s'était passé avec l'enfant. Entre ses mains, une vieille photo de classe où on peut le voir, plus jeune, entouré d'autres enfants et de son professeur de l'époque… disparu depuis.
~ C'est comme un rêve… qu'est-ce que je devrais faire ? J'ai l'impression de flotter, sa petite main dans la mienne. Dîtes Sensei, que dois-je faire ? Si Tetsuhito aime quelqu'un comme moi… bien sûr que je le chérirais. Je le traiterais avec la plus grande attention. Je ne lui ferais rien qui puisse le faire se sentir mal. Je ne veux pas faire ça… Bien sûr que je ne veux pas faire ça. Je le chérirais. Je dois rester calme. Doucement… ~
* * *
Les jours passent encore et, définitivement, la petite fille a refusé. Déçu mais déterminé à ne pas se laisser abattre, Tetsuhito a donc décidé du haut de ses presque neuf ans, qu'il ne fêterait son anniversaire qu'avec son professeur et personne d'autre ! Il reste quinze jours avant la fête et l'enfant est venu le voir dans sa chambre afin de savoir ce qu'ils allaient préparer pour ce jour spécial… car ce sera aussi le jour d'Halloween et il veut absolument que Shin lui montre ce qu'est cette fête dans le pays d'où il vient. Il veut qu'à son anniversaire tout le monde soit déguisé !
" Déguisé ? Désolé Tetsu, tu sais Halloween ce n'est pas vraiment une fête d'anniversaire à la base et… " " Mais c'est le mien !… Je veux que ce soit comme chez Sensei, comme là-bas… s'il vous plaît… " " Très bien, c'est d'accord. Nous préparerons des costumes alors… reste à savoir lesquels. "
~ Son regard d'enfant suppliant. Je me sens si nerveux… Que… Qu'est-ce que je devrais dire ? Ah… à m'écouter je croirais avoir à faire à un stupide adolescent face à son premier petit copain. Mais il est si mignon… si mignon. ~
* * *
Un jour de plus… sans un mot. Aucun échange, aucune décision de prise, que ce soit concernant la fête ou bien au regard des sentiments éprouvés pour cet enfant et que le professeur sait n'être pas « sains ». Après s'être endormi sans vraiment le réaliser et troublé par la présence du garçon à ses côtés qui n'a pas voulu quitter la chambre même durant la nuit, Shin se réveille en sursaut en se demandant ce qu'il peut bien être en train de faire là… un rêve, surpris que le petit ange soit déjà éveillé en silence depuis un moment et lui dise le plus innocemment du monde, en le fixant de ses grands yeux dorés :
" Je regardais le visage de Sensei en train de dormir. "
~ Dire quelque chose de si adorable Tetsu, je ne peux pas continuer à… ~
Sans réfléchir, l'enseignant s'approcha doucement de son visage pour poser ses lèvres sur les siennes, son bras l'entourant pour l'attirer à lui sur ses genoux. Un baiser doux qui surprit l'enfant… mais pas autant que la langue qui s'insinua entre ses lèvres, ni que les mains qui se glissèrent sur sa cuisse et sous son haut de pyjama. Son corps frêle parcouru de tremblements, des gémissements de crainte sur ses lèvres prisonnières et des larmes perlant aux coins de ses yeux. Perdu dans les sensations éprouvées, Shin mit quelques secondes avant de se rendre compte de ce que ses gestes provoquaient, mais une fois réalisé il s'arrêta immédiatement, effrayé lui-même par ce qu'il venait de faire et s'excusant encore et encore auprès de l'enfant terrorisé…
~ J'allais le forcer à… c'est vrai qu'il n'est pas une fille, bien sûr qu'il a peur… est-ce qu'à son âge je pensais déjà à… ? Non… Je dois prendre soin de lui… avec beaucoup de douceur… je ne le forcerais pas à faire quelque chose qu'il n'aime pas. Je vais agir normalement, je ne ferais pas ce qu'il ne veut pas… normalement… normal. Qu'est-ce qui est normal ?… Quand j'avais son âge, je n'avais pas encore franchi le pas, non ?… Donc… ~
* * *
Une bonne demi-heure de gêne s'écoula avant que Tetsu ne sorte de la pièce et disparaisse. Vingt-quatre heures de séparation plus tard, l'enfant avait osé revenir à proximité de son professeur dans la cuisine, timidement, Shin étant aussi embarrassé que lui en essayant de trouver un moyen d'agir « normalement »…
" Tiens, je t'ai préparé un lait chaud. " " Merci… Sensei. "
~ Est-ce que Tetsu a toujours été aussi calme?… ah… il s'est mit du lait sur la lèvre, si mignon… ~
Une action irréfléchie encore une fois. Perdu dans ses pensées, Shin vint lécher superficiellement ces lèvres, pour récolter la fine trace blanche qui salissait le visage de l'enfant, y déposant ensuite un tout petit baiser en lui caressant la joue, soufflant avec un demi-sourire…
" Tu avais du lait. "
Son sourire déchanta bien vite face au visage crispé et effrayé de Tetsuhito, qui le regardait les yeux écarquillés, ses mains serrées sur sa tasse de lait. Le silence suivit le malaise… et les quelques jours qui les séparaient encore de l'anniversaire s'égrainèrent ensuite dans la morosité et la gêne inconfortable. L'enfant restait dorénavant à distance de son professeur, isolé dans son coin, extraordinairement calme et silencieux pour un garçon qui était auparavant plein de vie. L'enseignant, lui, n'osait plus vraiment s’en approcher, de crainte d'agir mal encore… il avait beau faire, son problème ne trouvait pas de solution : un adulte n'a pas le droit d'aimer un enfant de cette façon-là, quelque soit le point de vue d'où il se plaçait, c'était sans issue… il n'était pas normal. Il devait lui manquer une case… Jamais il n'avait éprouvé ce type d'attirance… avant il était déjà gay, mais seuls les hommes de son âge l'intéressaient alors que là… est-ce que l'affection qu'il éprouvait pour Tetsu était un véritable amour inexplicable ou bien était-ce lui qui devenait fou ?
~ Ce n'est pas bon. Le sexe n'est pas bon. Embrasser, c'est interdit… tu le sais bien pourtant, non? Ne sois pas si pressé, ça ne sert à rien si Tetsu finit par me haïr… ce n'est qu'un enfant. Je ne suis pas normal. Je ne peux pas faire quelque chose comme ça… Je ne veux pas qu'il me haïsse. Huh ? Je viens seulement de réaliser que dernièrement, je n'ai plus revu le sourire de Tetsu… Je ne peux pas le laisser penser que je suis bizarre, mais… pourquoi ne souris-tu pas ? Qu'est-ce que je fais de mal ? ~ ~ Shin, si tu veux vraiment être avec cette personne, mais que celle-ci ne veut pas… Tu ne peux pas l'enchaîner. Tu ne peux pas la garder près de toi même en la tuant. ~ ~ J'ai compris Sensei… Je ne veux pas faire quelque chose qu'il ne veut pas… mais pourquoi ne sourit-il pas pour moi ?… J'ai envie de le voir… J'ai vraiment envie de le serrer dans mes bras quand je le vois, c'est vrai… mais il ne me sourit plus. Je ne comprends vraiment pas. Il ne sourit plus pour moi… ~ ~ … tu ne peux pas le voir si tu le tues. ~
* * *
Les gens vivant dans le pavillon se rendaient bien compte que quelque chose clochait depuis quelques temps, chuchotant dans leur dos au sujet du passé de ce professeur… la suspicion naissait. Ce jeune homme vivait là depuis 6 ans, mais tout le monde savait très bien qu'il résidait aux USA avant. Avait-il fuit le Japon ?… Un lâche pensaient certains, bien qu'ils n’en sachent pas plus. D'autres s'imaginaient des choses et commençaient à dire qu'une des cases de son esprit était sans doute totalement hors-service ou un truc du genre. Qu'il pétait les plombs à déambuler ainsi tel un fantôme en marmonnant tout seul comme s'il parlait à un ancien ami disparu… De son côté, Tetsuhito ne pensait pas de telles choses, mais il avait bien vu lui aussi que quelque chose ne tournait plus rond depuis la dernière fois. Alors malgré sa peur, trois jours avant son anniversaire, il se décida à venir frapper à la porte de chambre de son professeur, avec nervosité. C'est un professeur décontenancé et surpris qui lui ouvrit alors… craignant que seule une raison grave aurait pu décider l'enfant à s'approcher de lui à nouveau.
" Tetsu ? Que… qu'est-ce qui se passe ? " " Ahh… mh… je… je suis venu… pour vous voir Sensei… savoir si vous allez bien ? " " Me… voir ? " " Oui ! C'est… c'est vrai… "
~ Vraiment ? Ça fait tellement de bien… Il est venu me voir ! Mais qu'est-ce que je suis sensé faire maintenant ? Embrasser ce n'est pas autorisé, donc naturellement tout ce qui serait plus poussé est encore pire… alors est-ce que ça irait si je le prenais juste dans mes bras ? J'ai vraiment, tellement envie de te serrer contre moi… Je voudrais te dire que j'avais vraiment envie de te voir. Je voulais vraiment voir… Je voulais vraiment… ~ ~ Shin, si tu trouves quelqu'un de précieux à tes yeux, traite-le avec tout ton amour, d'accord ? En retour, cette personne t'aimera certainement aussi. ~
* * *
Le 31 Octobre, dans le jardin du pavillon des Tanaka. L'enfant souriant est déguisé en démon renard, portant un kimono clair et une queue rousse dans le bas de son dos. Un masque blanc, maquillé de rouge à la japonaise avec deux grandes oreilles, lui couvre le visage à demi et représente son animal. Juste à côté de lui, son professeur porte lui aussi un kimono avec un masque de démon également, un dragon… c'est Halloween mais ils sont au Japon, la tradition est donc de mise. La fin de journée s'annonce après des heures de jeu ensemble et ils sont tous les deux allongés sous un arbre, pour une petite sieste. Aucune équivoque cette fois durant toute cette merveilleuse journée, mais la tentation reste bien trop présente dans l'esprit de Shin, qui cherche désespérément un moyen d'exprimer ce qu'il ressent sans brusquer celui qu'il considère comme « son petit ange »…
~ Tetsu… si je lui prend la main il n'y a rien de mal, n'est-ce pas ? Et pourtant, ce sera vraiment un moyen de le chérir si je tiens sa main dans la mienne… si je… ~
Échec brutal. À l'instant où il voulut toucher des doigts la main d'enfant, l'un des domestiques de la maison passa dans le jardin et Tetsu repoussa vivement son professeur, le visage tendu sans plus aucun sourire. Cette réaction de rejet franc ressembla à un coup de poignard dans le cœur de Shin qui s'éloigna aussitôt sans un mot, l'esprit dévasté… plus il serait loin, moins ça ferait mal, il l'espérait… même si l'enfant lui courait après en l'appelant, il ne voulait plus l'entendre, seules ses pensées brûlaient son esprit.
~ Pas bon. Pas bon. C'est sans espoir. Je ne suis pas normal. C'est absolument mauvais de toucher Tetsuhito ! Je suis bon à condamner. Même si je ne voulais pas le blesser, je n'étais pas supposé le toucher en premier, il a détesté ça… Je ne pensais vraiment pas qu'il… Qu'est-ce que je suis sensé faire, Sensei ? J'ai promis que je le chérirais, mais je ne sais vraiment plus quoi faire… Je ne sais vraiment pas. Suis-je… inutile ? S'il n'a pas besoin de moi… Tetsu ne l'a jamais dit mais… Que dois-je faire ? Je ne peux rien tenter pour lui montrer que je tiens à lui plus qu'un simple professeur tiendrait à son élève… Alors… Qu'est-ce que je pourrais faire pour le rendre heureux ? Je suis désolé, je suis trop stupide pour comprendre, pour savoir ce que je suis sensé faire de ces sentiments envers lui… je dois être fou… ~
" Tetsu… est-ce que je devrais mourir ? " … Un murmure presque inaudible avant qu'il ne se tourne vers le petit garçon, perturbé, et qu'il ajoute à voix plus haute pour qu'il l'entende. " Est-ce que je devrais partir… disparaître ? Je suis désolé. Je n'avais pas compris que tu ne voulais pas du tout que je t'approche, que je te touche… J'ai essayé mais je ne t'ai même pas posé la question… je n'ai pas essayé de t'expliquer… je voulais te chérir, j'ai cherché comment mais… Je tiens à toi, je t'aime… vraiment… vraiment beaucoup… je t'aime Tetsu, mais… " " Sensei… j'aime Sensei aussi ! Je… Je ne hais pas ça ! Je ne hais pas ça du tout !… C'est juste que… personne n'a été comme ça avec moi… avant Sensei, je… j'étais tout seul tout le temps, alors… je savais pas quoi faire… personne n'a jamais dit qu'il m'aimait et… quand vous m'avez touché, je me suis senti… bizarre… je savais pas ce qui allait se passer… je suis désolé… je ne vous hais pas… même si c'était bizarre… j'aime Sensei… Je suis désolé. "
Un long silence, l'enfant tendant ses bras ouverts vers son professeur, les larmes roulant sur ses joues. Lui non plus ne comprenait pas vraiment ce que Shin ressentait, ni ce que lui-même éprouvait pour lui. Mais ce « Sensei » était la seule personne qui lui avait montré de l'attention, qui s'était occupé de lui depuis sa naissance. Il avait remplacé une mère morte et un père trop absent, il était tout son univers, puisque l'enfant n'avait jamais eu le droit d'aller plus loin que le portail du jardin de ce pavillon…
Cette nuit-là, Tetsuhito dormit dans la chambre de Shin. Adulte ou enfant… rien n'avait plus d'importance ; les tabous et interdictions, plus rien ne comptait. S'il aurait pu vouloir goûter à l'union de leurs corps, l'enseignant y renonça pourtant sans le moindre regret, préférant tout simplement le serrer dans ses bras tel une poupée fragile qu'il ne fallait pas briser. Une étreinte douce pour l'enfant, mais à la signification douloureuse. Une souffrance aiguë de l'âme, baignée de larmes pour sa première réelle preuve d'amour après neuf ans d'existence.
* * *
Je me réveillais en sursaut au milieu de la nuit, jetant un regard encore hébété sur le mirage d'un corps qui dormait près de moi et sur ses cheveux noirs comme l'encre caressant l'oreiller, qui me narguaient de l'envie de les effleurer… Avant de disparaître. Un pincement me serra le cœur en un sentiment douloureux. Kôhai… Ce fantôme du présent, tatoué et marqué par la vie, se supplante à ceux de mon passé, souvenirs de cet anniversaire d'Halloween que les années écoulées n'ont pas effacé. De ce jour où, déguisé en renard, j'ai inconsciemment quitté l'enfance pour goûter à la tendre amertume d'un homme qui avait préféré devenir fou plutôt que de me blesser.
Mais laissons de côté le présent, j'y reviendrais ensuite… Je ne suis pas encore prêt à affronter mes démons les plus récents.
Pour en revenir à la fin de mon enfance, les choses ont bien changées depuis ce jour-là : après trois ans de notre relation fusionnelle -qui n'alla jamais jusqu'à l'acte pourtant- quand j'ai eu 12 ans, Shin est parti, congédié par mon père qui jugeait que « son fils était en âge de suivre des cours à l'école de l'armée et qu'il n'avait plus besoin d'un professeur particulier ». J'en ai eu le cœur brisé. Shin également, je crois… Mais les regrets ne sont plus à avoir puisque mon tendre professeur a trouvé la mort peu de temps après, d'une tumeur au cerveau découverte trop tard pour être soignée. Son « grain de folie » provenait certainement de là. Mes larmes d'enfant avaient coulé douloureusement sur mes joues à l'annonce de cette nouvelle ; puis elles s'étaient taries, progressivement. Mais malgré tous mes efforts, je sens que mon sourire n'a plus jamais été aussi joyeux qu'à l'époque de mes neufs ans et depuis, ce sourire est devenu plus un mécanisme forcé qu'une réaction venant naturellement.
À côté de ça, mon Général de père s'est montré beaucoup plus présent pour l'éducation de son unique enfant, brillant cette fois par sa sévérité et ses exigences. Le monde évoluait, grandissait. Moi aussi. Adolescent, puis jeune adulte, je sais que je suis resté encore parfois ce petit garçon naïf, adorable et attachant, mais par dessus tout je suis devenu « le fils du Général », après qu'il ait lui aussi trouvé la mort, lors d'une manœuvre militaire à l'étranger. J'ai alors hérité de sa fortune, même si à vrai dire, je ne profite que moyennement de ces avantages, tout ceci ne m'intéressant pas… Si mon père n'avait pas été celui qu'on connaît, sans doute me serais-je facilement contenté d'une vie moins aisée. Mais la question ne se pose pas bien sûr : j'ai conservé le domaine familial, par respect, même si je n'y vis pas en permanence. Je préfère de loin l'appartement, proche du centre-ville, où je me suis installé peu après son décès.
Par la suite, je me suis engagé dans des études, puis une carrière policière. Mon expérience militaire me fut au moins utile dans ce domaine. Même si j'en avais les capacités, je ne recherchais pas particulièrement à atteindre les postes hauts-placés. J’imagine bien qu'il m'aurait certainement suffit de prononcer le nom du Général pour que cela m'ouvre de nombreuses portes… Mais à quoi bon? À la place, je me suis borné à « rester dans les normes », en me faisant plus ou moins discret, afin de ne pas attirer l'attention sur moi et tenter de vivre une existence plus tranquille et libre que celle que j'avais connue étant enfant. Il ne fallut tout de même pas très longtemps pour que je sois affecté au service du dernier chef de police en date, dont je ne citerais que le prénom en mémoire de lui, Masato. Un bon commissaire, professionnellement parlant. Mais un homme invivable, dont les mœurs dissolues étaient de notoriété commune.
Pour ma part, j'étais jeune, impressionnable et je manquais encore d'assurance à ce moment-là… Au sein du commissariat, il y en avait déjà plus d'un qui médisaient sur mon compte, considérant que le poste que j'occupais aurait dû revenir à un policier plus expérimenté, ou encore que ce n'était pas mes qualités de flic qui m'avaient valu cet avancement. Car tout le monde savait que le commissaire avait un faible pour les « jolis petits c*ls » et que c'était son principal critère de choix pour engager ceux et celles bossant directement pour lui… Je ne faisais probablement pas exception, bien que je me donnais du mal pour travailler droitement. Être assistant dans un service dirigé par cet homme n'était donc pas facile tous les jours et j'en ai payé les frais. D'autant plus quand malgré moi, cette relation professionnelle dériva vers le personnel…
J'ai longtemps peiné à concilier les deux, alors que Masato ne me laissait pas d'autre choix que de me soumettre à ses désirs : frôlant toujours les limites du harcèlement sans pour autant les franchir, il s'est progressivement servit de nos statuts respectifs comme moyen de pression pour me manipuler et m'a faire croire qu'il avait de réels sentiments à mon égard, mais ce n'était que pour obtenir de moi ce qu'il voulait… Les mois s'allongeaient et cette liaison à sens unique m'oppressait, impactant mon efficacité au travail. Je souffrais de savoir que pendant tout ce temps il me trompait avec d'autres hommes ou femmes, pour revenir ensuite vers moi plein d'excuses, d'attentions et d’exigences, insistant sans relâche jusqu'à m'épuiser, abuser de mon désespoir et de ma crainte de la solitude, pour m'obliger à céder sous ses assauts… Il est bien loin désormais, mais aujourd'hui encore, je m'en veux d'avoir été si faible et de ne pas avoir réussi à me défaire de lui plus tôt.
Avec le recul, deux choses positives sont tout de même nées de cette relation toxique… La première est que j'ai retenu la leçon et refuse de me laisser un jour reprendre au piège par un homme, tel que je l'étais avec Masato ! La seconde est que, sans cette liaison, je n'aurais peut-être pas rencontré celui qui à présent tient une place particulièrement importante dans ma vie… Kenichi. Il était flic dans un autre service du commissariat à l'époque et je ne l'avais jamais croisé auparavant. Jusqu'au jour où, accidentellement, il a surprit Masato en train de me forcer la main dans la salle des archives… Son intervention impromptue m'a sauvé la mise mais, mort de honte, j'ai quitté la pièce précipitamment, avec la hantise que de nouveaux ragots méprisants ne tarderaient pas à proliférer au sein du département… Pourtant, en fin de service ce soir-là, j'ai eu la surprise de trouver Kenichi devant la porte de mon bureau et je réalisais alors que mes craintes à son sujet, n'avaient pas raison d'être : suite à l'épisode des archives, il s'était renseigné pour savoir qui j'étais et où il pouvait me retrouver. Il n'avait rien dit de ce qu'il avait vu et souhaitait au contraire savoir si j'allais bien, m'offrir son soutien si j'en avais besoin et m'assurer qu'il ne me jugeait pas, qu'il ne parlerait à personne de ce qui s'était produit…
Pour la première fois, depuis la disparition de mon ancien professeur, j’avais la sensation de ne plus être livré à moi-même ; de pouvoir me reposer sur quelqu'un qui ne cherchait pas à se servir de moi et ne me considérait pas non plus comme « le fils du Général Tanaka » ou un vulgaire « joli minois », uniquement apte à se faire sauter sur un coin de bureau… À compter de cet instant, Kenichi a toujours été présent à mes côtés. Nous avons appris à nous connaître, partagé certains secrets. Son soutien sincère m'a permis de reprendre suffisamment confiance en moi pour m'affirmer en tant qu'homme mais aussi en tant que membre de la police de cette ville. Et ma rupture avec Masato marqua le début de mon amitié avec Kenichi, qui n'a fait que se renforcer depuis que le nouveau commissaire en poste, Izuno, nous a assigné en binôme, un an après notre première rencontre.
* * *
Dans le lit, mon regard se porta une nouvelle fois sur le vide laissé à mes côtés. Un vide que j'avais remplacé par un amant passager dormant encore paisiblement. C'est avec un soupir discret que je me passe la main dans les cheveux, en me demandant, comme à chaque fois, pourquoi j'avais encore cédé aux avances d'un parfait inconnu… Mais la vision de ce corps, nu sous les draps, me fit rougir malgré moi : j'ai cédé car le désir que je ressens souvent en « sa » présence ne peut être assouvi et car je me sens seul, c'est aussi stupide que cela !… « Il » a déjà quelqu'un, je le sais. Une femme, belle à ce qu'il paraît. Il me dit que sa relation avec elle n’est pas idéale… mais il la fréquente depuis bien avant notre rencontre et ne l’a toujours pas quittée. Contre elle, je ne ferais sûrement jamais le poids, inutile de me faire des illusions. Je ne veux pas risquer de gâcher ce que l'on partage déjà ensemble, juste pour tenter de satisfaire mes désirs ou combler ma solitude. Ce serait égoïste de ma part et Kenichi mérite bien mieux que moi. Même si… Même si j'ai le sentiment que cela va au delà d'une envie physique passagère ; que je pourrais résister autant que je le voudrais, ça ne changerait rien à ce que je ressens au fond de moi, quand je suis en sa présence. Rhaa… ça m'horripile d'être aussi faible !
Mieux vaut encore que je détourne les yeux et me recouche. En tournant le dos ainsi à ce quidam partageant mon lit, ma tête enfouie sous l'oreiller pour ne surtout pas qu'il lui prenne la mauvaise idée de me surprendre dans cet état de confusion. Avec un peu de chance, il croira que je dors et ne me touchera pas lorsqu'il se réveillera pour rentrer chez lui…
Il me laissera seul. Je déteste ça !
C'est décidé… Demain, je vais me trouver quelqu'un. Pas un humain, c'est trop volage. Et je ne tiens pas à faire involontairement de malencontreuses comparaisons entre mon ami et celui que j'hébergerais. Cela pourraient les blesser, malgré moi. Non, je dois trouver un… comment appellent-ils ça déjà? Ah oui… un « hybride ». C'est ça. Les animaux sont fidèles, n'est-ce pas? Ils n'abandonnent pas leur maître et…
Ha. C'est pas vrai. Qu'est-ce que je raconte… Voilà que j'en suis réduit à cette bassesse, à présent ?! Considérer ces êtres comme de simples animaux ?… Non. J'ai honte. C'est du délire !
Mais quoi que j'en pense, il m'en faudra un : le commissaire Izuno l'a exigé pour ma protection, si je tiens à conserver ma place… Depuis ma dernière enquête d'infiltration « imprévue » chez une famille locale de la pègre, il a estimé -à juste titre- que ma vie pourrait être menacée. J'avoue qu'à ce sujet, j'ai vraiment agit inconsidérément et que la situation… a clairement échappé à mon contrôle. Je n'aurais jamais dû approcher ce yakuza pour commencer, ni tenter de me jouer de lui pour récolter des informations. C'était comme jouer avec un feu incandescent ; je m'y suis brûlé les ailes. Kôhai était trop dangereux, trop imprévisible, trop possessif, trop… séduisant ? Mais il s'est révélé aussi tellement plus que ça !… Même si être avec lui m'a indubitablement mis en danger, il est allé jusqu'à renier son clan pour me sauver ! C’est… Il n’est pas responsable du milieu dans lequel il a grandi, ni de ce que sa famille a fait de lui. Il n’avait pas le choix. J’aurais voulu qu’il s’en sorte autrement… mais ils ont mis sa tête à prix désormais. La mienne aussi, à ce qu'il paraît…
Mais c'est une autre histoire que je n'ai pas le droit de divulguer davantage ici. Les seules choses à en retenir sont que j'ai bien failli y laisser ma peau et que c'est un miracle si je n'ai pas été mis à pied. Les détails de l'affaire ont été classés sans suite en haut lieu et passés sous silence. Officiellement, l'enquête à laquelle « j’aurais » été affecté en solo, « n’a eu aucun résultat ». Les blessures qu'ont m'a infligées ? La balle qui m'a perforé le bras ? « Accidentelles ». « Une balle perdue lors d'un affrontement entre deux clans sans lien avec l'enquête ». J'étais juste « au mauvais endroit, au mauvais moment »… Je hais leur foutue décision, qui m'oblige à me taire et mentir, mais je n’ai pas eu mon mot à dire ! Je n'ai même pas pu en parler à Kenichi et je supporte mal de devoir lui cacher la vérité sur mes absences répétées de ces derniers mois, ou sur les vraies raisons qui m'ont cloué sur ce lit d'hôpital où il m’a retrouvé, il y a deux semaines.
Je n'ai repris le travail en binôme avec Kenichi, qu'il y a huit jours… Nos retrouvailles m'ont à la fois soulagé et accablé. Je sens bien qu'il se doute de quelque chose. Il a dû comprendre que quelque chose clochait. Sans doute car j'élude ses questions et que je me confie moins qu'avant. Je n'ai jamais été doué pour le mensonge. Le silence est ma seule option, bien que ça pèse sur ma conscience, même pendant mon sommeil : si Kôhai n'est plus qu'un fantôme qui me hante au réveil ou dans la rue lorsque mes yeux s'imaginent l'apercevoir, étendu là ou déambulant au milieu d'une foule ; celui dont je rêve de plus en plus dernièrement, est ce brun que je vois tous les jours, que je côtoie de près. Peut-être est-ce cette proximité quasi permanente qui a finit par effriter et troubler mes sens ? Ou bien au contraire est-ce le manque ressenti durant ces derniers mois où j'ai été contraint de le tenir à l'écart de ma vie, pour sa sécurité ?
Je dois vraiment trouver le moyen de me sortir de la tête ces fantasmes à son sujet… et je ne peux pas continuer non plus de noyer mes peines dans les bars et les relations d'une nuit, sinon je finirais par sombrer. Reprends-toi Tetsu !
Le commissaire a sans doute raison… je rechigne à l'admettre, mais… j'ai besoin d'aide. De protection. Si j'achète l'un de ces hybrides, est-ce qu'il sera réellement… « à moi » ?
S'il m'appartient vraiment, je ne serais plus seul…